G. C. Quel est le rôle de Wagner dans la région sahélienne ?
B. L. Je vais être très clair : je refuse cette manie d’attribuer à d’autres les causes de nos échecs. Si Wagner a pris notre place en RCA, c’est parce que Sarkozy nous a fait évacuer Birao, verrou de toute cette partie de l’Afrique que les Russes, qui eux savent lire une carte, ont tout naturellement occupée. Ensuite parce que Hollande a fait distribuer des couches-culottes par nos armées alors qu’il fallait taper et très fort la Seleka. Nous avons ainsi perdu la confiance de nos alliés locaux et tout notre prestige. Les Russes n’ont plus eu qu’à cueillir le fruit mûr que nous avions laissé sur l’arbre… Au Mali, ce fut la même chose et je l’ai longuement expliqué au début de cet entretien.
Mais, plus généralement, à travers le rejet de la France, ce sont les « valeurs » de l’Occident que l’Afrique rejette. Le continent qui, dans sa globalité, se reconnaît dans les valeurs naturelles familiales voit avec un haut-le-cœur le « mariage pour tous », les délires LGBT ou encore le féminisme castrateur de toute virilité proposés comme « valeurs universelles » par l’Occident. Pour les Africains, il s’agit là d’une preuve de décadence. Voilà pourquoi la Russie apparaît, au contraire, comme un contrepoids civilisationnel à la broyeuse moralo-politique occidentale.