Je veux papa et maman
«Père-et-mère» congédiés par la loi CHRISTIAN FLAVIGNY, SALVATORE,
Et l’enfant dans tout cela ? Cette question, soulevée par le projet de loi sur le « mariage pour tous », est le fil conducteur de l’ouvrage du pédopsychiatre Christian Flavigny, qui dirige le département psychanalyse de l’enfant et de l’adolescent à l’hôpital de la Salpêtrière. Cette question fut, sans nul doute, au coeur de son exposé, lors de son audition par les parlementaires sur le sujet. « L’enfant n’a pas seulement besoin de se retrouver dans la famille, il y a besoin de s’y retrouver, de comprendre pourquoi il y est » , explique l’auteur. Certes, l’amour est un ingrédient de la vie familiale, quelle qu’elle soit, qui profite à l’enfant, mais il n’est pas suffisant pour grandir. La « colonne vertébrale psychique » indispensable à cette fin, c’est la filiation. Elle seule rend cohérente sa venue auprès de ses parents, elle seule l’établit comme leur enfant. La base de l’identité, c’est la filiation. Celle-ci structure, au demeurant, l’interdit de l’inceste. La signification en latin du mot « parent » - pareo - renvoie à l’« enfantement » - partum parere - qui implique la différence des sexes au sens du masculin et de féminin. « Tout enfant sait que l’homme et la femme se rendent père et mère depuis leur incomplétude sexuelle » , écrit l’auteur. Et si l’enfant adopté n’est pas le fruit de l’union corporelle de ses parents, il lui importe de se sentir le fruit de leur désir partagé d’enfanter. De fait, dans le cas d’un couple homosexuel, l’enfant doit surmonter le fait que, pour lui, le scénario de sa conception n’est pas plausible. Et de se demander pourquoi il n’a pas mérité d’avoir « mon-père-et-ma-mère ». Au moment où le débat autour du projet de loi sur « le mariage pour tous » est relancé par une possible ouverture de la procréation médicalement assistée (PMA) aux couples de lesbiennes, l’ouvrage a le mérite de rappeler que la procréation nous fait, non pas créateurs (ce qui relèverait de l’orgueil de la toute-puissance) mais procréateurs, relayant le devenir humain. Compacte et directe, la démonstration de Christian Flavigny est convaincante : le projet de loi défendu par le gouvernement actuel favorise peut-être les parents, mais pas l’enfant.