Le gouvernement de centre gauche se prépare à renvoyer des dizaines de milliers de demandeurs d'asile déboutés.
Le gouvernement suédois a demandé à la police et à l'Office des migrations de préparer l'expulsion de dizaines de milliers de réfugiés dont la demande d'asile a été rejetée, afin d'alléger la pression migratoire sur le pays. Il a accueilli, proportionnellement, en 2015, le plus grand nombre de migrants en Europe. L'année dernière, 163.000 réfugiés ont déposé une demande d'asile en Suède, l'équivalent de 1,3 million de personnes pour un pays de 80 millions d'habitants comme l'Allemagne, laquelle a reçu 1,1 million de réfugiés sur la même période.
Jusqu'à 80.000 personnes sur les 163.000 arrivées en Suède en 2015 peuvent être expulsées, a estimé le ministre de l'Intérieur, Anders Ygeman (social-démocrate), se basant sur les statistiques des dossiers examinés ces dernières années: 55 % de demandes acceptées, celles des Syriens surtout, contre 45 % refusées, en particulier celles des Afghans et des Irakiens. L'annonce de ce plan d'expulsions massives survient alors que le royaume enregistre une chute spectaculaire de l'afflux de migrants, après l'instauration début janvier du contrôle aux frontières sud du pays.
Face à ce «grand défi d'expulsions de masse», les autorités suédoises misent sur des départs volontaires, mais aussi forcés. «Je crois qu'on verra plus de charters de réfugiés, organisés avant tout dans le cadre de l'UE, et en coopération avec l'Allemagne par exemple», a souligné M. Ygeman sur la télévision suédoise SVT, au lendemain de sa rencontre à Berlin avec son homologue allemand à ce sujet. «Il s'agit de motiver ces gens (déboutés) à partir et d'être prêts à les aider pour faciliter leur retour, et à la limite les y contraindre», selon le ministre, qui avoue toutefois qu'il «existe un risque significatif» de voir des réfugiés rester malgré tout en Suède. «Nous devons nous occuper du mieux possible de ceux qui peuvent rester, mais ceux qui reçoivent une réponse négative doivent repartir», a justifié le chef du gouvernement de centre gauche, Stefan Löfven, interrogé par l'agence de presse TT.
En 2015, l'Office des migrations a demandé à la police d'expulser quelque 9000 réfugiés déboutés
La mission est en effet loin d'être aisée, d'autant que plusieurs pays sont réticents à reprendre leurs ressortissants. L'expérience des années passées a montré qu'un grand nombre de réfugiés déboutés ont choisi d'entrer dans la clandestinité pour rester à tout prix en Suède. «C'est pourquoi nous devons leur rendre la vie la plus difficile possible, dit M. Ygeman, en nous attaquant aussi aux patrons qui exploiteraient cette main-d'œuvre illégale et la situation dans laquelle les clandestins se trouvent.»
Depuis 2012, environ 30.000 réfugiés arrivés en Suède ont disparu, et les autorités ignorent combien se trouvent encore sur le territoire. En 2015, l'Office des migrations a demandé à la police d'expulser quelque 9000 réfugiés déboutés. Mais 70 % d'entre eux étaient introuvables à leur adresse, et les policiers, faute de ressources suffisantes, ont renoncé à les rechercher.
Commentant le plan d'expulsion du gouvernement, qui entrerait en vigueur en 2017, des hommes politiques craignent que beaucoup des demandeurs d'asile déboutés prennent le maquis, mettant en garde contre la création d'«une société parallèle» de clandestins qui cherchent à survivre en travaillant au noir. «C'est une nouvelle sous-classe travaillant dans des conditions ressemblant à de l'esclavage», selon le député chrétien-démocrate Roland Utbult.
Des voix s'élèvent aussi pour mettre en doute la conformité juridique de cette annonce. «Que l'on fasse une telle prévision, quelle qu'en soit la raison, est une menace à l'état de droit, affirme Terfa Nisébini, avocate spécialisée dans le droit migratoire. Cela peut influer sur le travail de l'Office des migrations et des tribunaux (chargés de se prononcer sur les expulsions) lorsque les autorités prévoient déjà un certain pourcentage des demandes d'asile rejetées.»
Immigration: l'Union européenne propose un «frein d'urgence» à Cameron
L'Union européenne a proposé à la Grande-Bretagne d'adopter un mécanisme de «freinage d'urgence» qui permettrait de limiter l'immigration en provenance des autres États membres, dans le cadre de la renégociation des relations entre Londres et Bruxelles. Le principe: autoriser n'importe quel État membre en mesure de démontrer que les flux migratoires menacent ses prestations sociales de cesser d'en faire bénéficier les nouveaux venus pendant une durée pouvant aller jusqu'à quatre ans.
Il s'agit d'une des principales exigences du premier ministre britannique David Cameron, qui a promis d'organiser un référendum sur le maintien au sein de l'UE et de faire campagne pour le «yes», à condition que ses demandes soient satisfaites.
Il doit évoquer le sujet vendredi à Bruxelles avec le président de la Commission européenne Jean-Claude Juncker. S'ils s'entendent sur ce point, le chef du gouvernement britannique pourrait approuver dimanche d'autres réformes lors d'une entrevue avec le président du Conseil européen Donald Tusk. L'essentiel de ces réformes à d'ores et déjà fait l'objet d'accords de principe, indique-t-on de sources proches des discussions. Donald Tusk devrait ensuite remettre dès la semaine prochaine une liste de propositions écrites aux 27 autres États membres pour tenter de régler les derniers désaccords avant le Conseil européen des 18 et 19 février.