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14 janvier 2013 1 14 /01 /janvier /2013 17:11

 

14 janv. 2013

Le Figaro

Par Alexis Brézet, directeur des rédactions du Figaro abrezet@lefigaro.fr @abrezet

 

340 000 ? 800 000 ? 1 million ? À la limite, peu importe !


Pour rituelles (et insolubles) qu’elles soient, ces batailles de chiffres n’ont, au fond, guère d’importance. Le spectacle de cette foule immense - digne, joyeuse et déterminée -, qui a défilé hier sans jamais céder à cette « homophobie » dans laquelle certains auraient souhaité qu’elle se précipite, est autrement éloquent. Venus de tout le pays, pour dire leur refus du mariage et de l’adoption pour les homosexuels, les « marcheurs pour tous » ne représentent ni un « lobby » - même si les catholiques étaient fort nombreux dans leurs rangs – ni une « catégorie » attachée à défendre tel ou tel avantage acquis. N’en déplaise aux socialistes, que l’on a connu moins méprisants, ce n’est pas la « rue » qui a parlé hier, ce sont les Français. Plus exactement, les représentants de cette moitié des Français (petite moitié dans le cas du mariage, nous disent les enquêtes d’opinion ; grosse moitié s’agissant de l’adoption) qui, en conscience, et le plus souvent sans arrière-pensée politique, s’estiment blessés dans leurs convictions les plus profondes par le projet du gouvernement. Ces Français-là – c’est bien leur « droit » - ne veulent pas du « projet de civilisation » proposé par Mme Taubira.

La civilisation actuelle leur va fort bien ; ils continuent de penser que le mariage, entendu comme l’union d’un homme et d’une femme en vue d’avoir des enfants, en est le fondement. Ils redoutent l’engrenage qui conduit inévitablement de l’adoption « pour tous » à la PMA « pour tous » et à la gestation pour autrui « pour tous ». Ils ne sont pas moins dignes de considération que les autres Français. Qui peut prétendre aujourd’hui qu’ils ne méritent pas d’être entendus ?

Depuis des semaines, en effet, c’est la même chanson.

Le mariage pour tous, nous dit-on, c’est la 31e proposition du projet de François Hollande. En l’élisant, les Français ont voté pour la loi. La messe est dite. Circulez, y’a rien à voir… Quel sophisme !

 

 


A peine plus d'un français sur 2 ont voté pour F Hollande. Ces français là voulaient-ils cette 31e proposition ? Ils n'avaient pas la possibilité de l'exclure. Nombreux sont venus exprimer leur rejet en participant à la manifestation. Voxpop

 

 


Le droit de vote pour les étrangers aussi était dans le programme de Hollande ; il y a renoncé. L’augmentation de la TVA n’y était pas ; il l’a annoncée. Et quelle étrange conception de la démocratie ! À ce compte-là, autant mettre en congé l’Assemblée, le Sénat et laisser pendant cinq ans François Hollande appliquer par ordonnance l’intégralité de son projet… puisque les Français, une fois pour toutes, ont voté. Allons ! Si une poignée de jeunes gens décidés ont réussi, sans moyens ni appareil, à rassembler une des manifestations les plus importantes de ces trente dernières années, c’est bien que l’acquiescement au mariage pour tous ne va pas de soi.

Parce que l’élection présidentielle n’a jamais donné à personne le droit de brutaliser la conscience d’un Français sur deux, le président de la République (vendredi encore, il refusait de recevoir les organisateurs de la Manif pour tous !) ne peut pas faire comme si rien ne s’était passé. Désormais, il ne peut plus opposer aux adversaires du mariage et de l’adoption pour les homosexuels l’indifférence obstinée qu’il leur a jusqu’ici réservée.

La sagesse élémentaire, maintenant, serait de suspendre le projet de loi

et de finir par là où l’on aurait dû commencer. Un débat national, un vrai. Une grande concertation, une vraie. Et pas ce simulacre d’audition parlementaire à quoi les représentants des grandes religions, entre deux portes, ont été conviés. Que tous les arguments, ceux des « pro », ceux des « anti » et ceux des hésitants, soient mis sur la table et débattus publiquement. Que les conséquences à court, moyen et long terme du mariage, de l’adoption et de la procréation médicalement assistée soient évaluées par des juristes, des pédopsychiatres, des philosophes et des religieux. Que tous les sujets soient examinés, et notamment celui du statut du beau-parent, qui ne concerne pas, loin s’en faut, les seuls homosexuels. Que toutes les propositions alternatives soient passées en revue, et notamment celle de « l’alliance civile » avancée par une partie de la droite. Bref, qu’il en aille pour le mariage et l’adoption pour les homosexuels comme il en est allé naguère pour les retraites, la Sécurité sociale ou le droit de la nationalité. Le gouvernement vient bien d’installer une « commission du dialogue » sur l’aéroport de Notre-Damedes-Landes ! Les millions de Français qui s’opposent pacifiquement au mariage pour tous ne mériteraient-ils pas au moins autant d’égards qu’une poignée d’« écoguerriers » ?

Et ensuite ? Ensuite, si le débat national permet de déboucher sur une solution acceptable par tous

– après tout, ce n’est pas impossible –, le Parlement, droite et gauche confondues, pourra le graver dans le marbre de la loi. Sinon, si les positions sont décidément inconciliables, alors il faudra bien se décider à consulter directement les Français. Car, dans une matière aussi grave, qui touche les individus au plus profond de leurs croyances et de leurs convictions et qui met en jeu - de l’aveu même de ses promoteurs - notre modèle de « civilisation » ,

 

c’est au peuple souverain, et à lui seul,

qu’il appartient de trancher.

 

Il l’a fait, par exemple, quand il s’est agi de décider de l’avenir de la NouvelleCalédonie. Celui du mariage seraitil moins important ? On connaît l’argument opposé à la procédure référendaire. L’article 11 de la Constitution, revu en 2008, n’inclut pas les « questions de société » dans le champ du référendum. C’est vrai. Mais la loi fondamentale prévoit que puissent être soumises au peuple « les réformes relatives à la politique économique, sociale ou environnementale de la nation ». Le mariage, la famille ne relèvent-ils pas au premier chef de la politique « sociale » ? Si tel n’est pas le cas comme certains le prétendent, alors il est urgent de supprimer la branche « famille » de la Sécurité « sociale »… Arguties ! En vérité, François Hollande est d’autant plus libre de soumettre le projet à référendum qu’une telle décision est insusceptible de recours constitutionnel : le peuple est souverain. Rien n’interdit donc au chef de l’État de le saisir. Rien, si ce n’est – tiens donc ! – la crainte qu’une majorité de Français lui répondent non.

Certes, le président de la République peut fort bien considérer que la manifestation d’hier ne fut qu’un mauvais moment à passer,

 

un baroud d’honneur pour solde de tout compte. Il peut, il en a le droit, se dépêcher de soumettre le projet au Parlement et laisser à « sa » majorité le soin d’adopter la loi au plus vite. Il aurait tort cependant de sous-estimer les risques politiques d’un tel passage en force. D’abord, parce que la détermination des opposants au projet est considérable – on a pu en juger hier – et que rien ne dit qu’elle va retomber. En 1984, François Mitterrand avait pensé pouvoir passer outre la première grande manifestation, à Versailles, contre la loi Savary. Une seconde, plus colossale encore, avait suivi à Paris, qui l’avait contraint à retirer son texte, son ministre et son premier ministre par-dessus le marché… Ensuite, et peut-être surtout, parce que François Hollande, face à Nicolas Sarkozy, a moins été élu sur un programme que sur une promesse : celle d’apaiser la France et de réconcilier les Français. Si demain, sourd à la clameur du peuple et remettant au goût du jour le vieux principe socialiste « vous avez moralement tort, parce que vous êtes politiquement minoritaire » , il devait passer à la hussarde sur un sujet qui divise à ce point le pays, c’est bien davantage qu’un simple engagement de campagne que les citoyens lui reprocheraient d’avoir oublié. C’est le pacte solennel passé entre eux et lui, à l’occasion de l’élection présidentielle, qu’à bon droit les Français pourraient l’accuser d’avoir trahi.

 

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