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3 mai 2012 4 03 /05 /mai /2012 09:04

 

  • 3 mai 2012
  • Le Figaro
  • LUC FERRY FER luc.ferry@luc.ferry@yahoo.fr
Non, Mario Draghi ne roule pas pour Francois Hollande!

Depuis que Mario Draghi a lancé sa bombinette dans le débat européen en affirmant la nécessité d’un « growth compact » , d’un contrat de croissance qui viendrait compléter, voire assouplir le fameux principe de la règle d’or cher à l’allemagne, François Hollande et le Parti socialiste sont sur un petit nuage. Ils ont évidemment interprété les propos du président de la BCE comme un soutien à leur volonté affichée de « renégocier » le « pacte de rigueur budgétaire » actuellement en cours de validation.

Il n’est pas sûr, pourtant, qu’ils aient raison. Car sous les mots, il y a les réalités, et elles peuvent être fort différentes selon la lecture qu’on donne du discours de M. Draghi. Comme le faisait observer l’autre jour, en bon pédagogue, l’un de nos plus brillants économistes, Nicolas Bouzou, il faut soigneusement distinguer deux types de croissance : la croissance « keynésienne » et la croissance « schumpétérienne ». La première réside soit dans l’élargissement du nombre des consommateurs, soit en une augmentation de leurs revenus qui leur permet de dépenser plus et de relancer ainsi l’économie en remplissant les carnets de commandes des entreprises.

Potentiellement, cette croissance-là est pleine d’avenir, du moins au niveau mondial, dans la mesure où l’inde et la Chine se développent à une vitesse fulgurante. Elle paraît en revanche faiblement prometteuse en Europe où nos entreprises, écrasées par la dette, les charges sociales et soumises à une concurrence déloyale face aux pays émergents dont les coûts de production sont très inférieurs aux nôtres, ne peuvent guère envisager des augmentations de salaires mirifiques.

La croissance schumpétérienne est bien différente : elle tient principalement à l’innovation, à ce que Schumpeter nommait la « destruction créatrice » : quand nos ordinateurs ou nos smartphones font l’objet d’innovations et de progrès importants, quand les connexions Internet s’améliorent, que les mémoires augmentent, que les connectiques changent, etc., les modèles anciens deviennent obsolètes, ce qui oblige les consommateurs à en acheter sans cesse de plus récents tout en « détruisant » ceux qui n’ont plus cours. Destruction « créatrice », donc.

Reprenons le fil du débat européen. Que la rigueur ne suffise pas, que la croissance soit indispensable, ne fût-ce que pour pouvoir remettre à flot nos États minés par la crise de la dette souveraine, est une évidence que Mario Draghi a parfaitement bien fait de poser sur la table. Tout le monde ne la partageait pas outre-rhin. Reste à savoir de quelle croissance on parle. L’allemagne a, depuis plus de dix ans maintenant, choisi de faire, à l’écart des relances keynésiennes, une politique de l’offre semblable à celle que réclame depuis des lustres le Medef. Là encore, ne nous contentons pas de formules et tâchons d’être concrets : les Allemands ont compris que, face aux deux milliards et demi de consommateurs potentiels que représentent les populations de l’inde et de la Chine, il ne fallait pas rester les deux pieds dans le même sabot, mais investir massivement dans la fabrication de produits dont ces deux pays auraient besoin pour leur développement, par exemple des machines-outils sophistiquées qu’ils ne savent pas (encore) fabriquer aussi bien que les Européens. Ils ont donc travaillé d’un même mouvement sur les deux croissances, élargissant le réservoir de clients et innovant sans cesse dans la conception et la fabrication de matériels nouveaux. On ne voit rien de tel dans le programme socialiste qui, sur ce point, rappelle surtout le fameux « tax and spend » (« on taxe et on dépense ») des travaillistes anglais des années 1970. Du coup, il joue essentiellement sur la croissance keynésienne, et encore, dans un seul pays, la France. Au niveau de l’europe, il semble en tenir pour une politique de « grands travaux », qui résorbera bien sûr une part du chômage à court terme, mais de manière artificielle, par le biais, comme toujours, d’emplois aidés, c’est-à-dire financés, non par l’économie réelle, mais par le budget des États. C’est là, à ce qu’il me semble, que le bât blesse.

Quel dommage que ce débat s’inscrive si tard dans la campagne, car il est crucial ! Sauf à s’en tenir aux apparences, il ne pouvait qu’aller dans le sens d’une politique courageuse de réduction des déficits et d’innovation industrielle, celle que les libéraux défendent depuis toujours contre un modèle social-démocrate qui, pour sympathique qu’il paraisse à première vue, risque fort de n’être à nouveau qu’un mol édredon. blog : www.lucferry.fr

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Published by voxpop - dans Politique

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