Par ANTOINE LANDROT
Banquiers et assureurs regrettent la hausse du plafond du livret A dans un contexte
défavorable.
La décision de relever le plafond du livret A, actuellement de 15 300 euros, de 50 % en deux temps (25 % à la mi-septembre et 25 % avant la fin de l'année), au lieu d'un doublement promis par François Hollande pendant la campagne présidentielle, reste considérée comme une mesure à contretemps par le monde de la banque et de l'assurance.
Les banques sont les premières concernées. Elles collectent les encours du livret A et du livret de développement durable, dont le plafond est porté à 12 000 euros, mais n'en centralisent que 35 % (le reste est transféré à la Caisse des dépôts, CDC, pour financer notamment le logement social). En juin déjà, l'intention du nouveau gouvernement de toucher aux plafonds des livrets était connue. Elles étaient montées au créneau pour fustiger cet encouragement à l'épargne courte, alors que le contexte de prudence incite les banques à privilégier l'épargne longue. Tirant les leçons de la crise financière, la future règlementation de Bâle 3 renforce en effet considérablement leurs contraintes de liquidité.
Volant au secours des établissements, le gouverneur de la Banque de France, Christian Noyer, avait alors invité le gouvernement à faire preuve de "beaucoup de prudence" dans les modalités de ce relèvement "pour ne pas déstabiliser le financement des entreprises, le financement des ménages, le financement de la dette publique" en provoquant un flux de capitaux vers ces livrets. Avec sa rémunération (actuellement de 2,25 %), le principal intérêt de ce produit d'épargne populaire est d'être exonéré de toute fiscalité.
Dans un communiqué diffusé hier après-midi, la Fédération bancaire française (FBF) réitère cette critique : elle "rappelle que cette mesure aura un impact négatif sur la capacité des banques françaises à financer l'économie car les fonds provenant de la collecte du livret A ne sont pas utilisables à cet effet, alors même qu'une nouvelle directive européenne impose aux banques d'avoir des liquidités plus importantes pour continuer à faire du crédit aux particuliers et aux entreprises. [...] Il est crucial que l'épargne des Français, qui est d'un montant élevé, soit mieux orientée au service du financement à long terme de l'économie, par une action résolue en faveur de l'épargne longue".
La forte augmentation de la collecte du livret A depuis le début de l'année apporte de l'eau au moulin des détracteurs de la mesure : selon les derniers chiffres de la CDC, la collecte au cours des sept premiers mois de l'année s'est élevée à 13,3 milliards d'euros, portant les encours totaux à 230,2 milliards d'euros.