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11 janvier 2013 5 11 /01 /janvier /2013 22:01

11 janv. 2013

Le Figaro

Hugues Moutouh

 

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L’avocat* déplore la perte de sens de nos sociétés contemporaines.

La vérité est que notre République est devenue, à force de n’assumer aucun choix sur la vie bonne, sur le meilleur genre de vie (…), une simple auberge espagnole

 

Dimanche, ce sont sans doute plusieurs centaines de milliers de personnes qui convergeront vers le Champ-de-Mars, à Paris, pour protester contre le projet de loi du gouvernement ouvrant le mariage et l’adoption pour tous. Les Françaises et les Français qui défileront ce jour-là ne sont pas homophobes. Certains d’entre eux n’ont d’ailleurs pas manifesté, en son temps, contre le pacs. Ils le feront pourtant, cette fois, avec la conviction d’agir pour une « juste cause ». Mais quelle cause, au juste ?

La première relève de l’évidence. Il suffit de lire les slogans inscrits sur les banderoles qui s’apprêtent à être déployées : « Un papa, une maman, y a pas mieux pour un enfant. » Qui cherche une référence plus savante pourra relire avec profit les écrits du regretté doyen Jean Carbonnier sur le droit de la famille. Les rédacteurs du Code civil n’ont pas jugé utile de définir le mariage, disait-il, parce que chacun sait ce qu’il faut entendre par là. « C’est la plus vieille coutume de l’humanité. » Plus qu’un simple contrat, créé par le consentement mutuel, le mariage est une véritable institution, « un tout organique, une espèce de corps social dépassant les volontés individuelles » , qui répond à une nécessité davantage morale – satisfaire à la meilleure éducation possible des enfants - que physique. Le mariage tire de là, même depuis sa laïcisation, cette sorte de gravité religieuse qui lui est propre, et qui le sépare d’une union libre quelconque.

La seconde cause est moins apparente, mais beaucoup plus profonde. Ce projet de loi, tout choquant qu’il puisse être, ne suffit pas à expliquer le fort sentiment de désespérance qui envahit ses détracteurs. Ce qu’ils ressentent au plus profond de leur âme est le grand vide de nos sociétés démocratiques libérales, je veux dire le vide des valeurs. Cette société-providence omniprésente par ailleurs, qui assiste et protège, au risque parfois d’étouffer l’individu, s’abstient systématiquement de se prononcer sur l’essentiel, c’est-à-dire de prendre position dans le conflit des systèmes de valeurs ou des conceptions du monde. Notre société postmoderne ne cherche à promouvoir aucun projet particulier, aucune conception de la vie bonne. C’est même son titre de gloire : elle se veut une République « procédurale », autrement dit, neutre et fière de l’être. Le rôle des gouvernants n’est pas de contribuer à rendre les citoyens vertueux, ni de promouvoir un projet de société particulier. Juste de donner aux individus l’occasion de poursuivre leurs objectifs propres, dès lors qu’ils ne sont pas incompatibles avec une liberté égale pour tous.

La vérité est que notre République est devenue, à force de n’assumer aucun choix sur la vie bonne, sur le meilleur genre de vie, sur les vertus qui méritent d’être estimées, honorées et récompensées, une simple auberge espagnole, où l’on ne trouve que ce que l’on y apporte. Sans même proposer un retour à Aristote et au modèle de la cité antique, qui n’en est pas un à bien des égards, il faut déplorer, dans nos sociétés libérales contemporaines, la perte de sens de concepts aussi essentiels pour une communauté humaine que la vertu, la morale et la politique.

En refusant de se prononcer à l’égard des conceptions du bien, de promouvoir un modèle d’excellence ou de vertu, ce qui se traduit par le rejet de tout décalage entre la société telle qu’elle est et la société telle qu’elle doit être, les gouvernants commettent une double erreur. D’une part, ils contribuent directement à l’appauvrissement de la vie civique, et de la vie humaine, si l’on s’accorde à penser que l’homme est un animal politique qui ne peut pleinement accomplir sa nature profonde que dans la cité.

D’autre part, leur abstention traduit un choix par défaut, parce que la neutralité de la puissance publique est illusoire. Ce choix subi est bien, à terme, le pire qui soit : celui du relativisme qui conduit inéluctablement au nihilisme moral.

Seuls les moins exigeants d’entre nous s’en contenteront, aveuglés qu’ils sont par leur besoin infini de reconnaissance et le culte qu’ils rendent à leurs droits subjectifs.

Les autres, au nombre desquels il faut compter ceux qui manifesteront le 13 janvier prochain, attendent autre chose de la vie en société. Ils pensent qu’il n’est pas juste de déconnecter la pensée et l’action politique de toute réflexion sur les valeurs. Ils pensent que la vie politique, la vie en société, qui n’est qu’une autre façon de parler de la vie humaine, ne peut reposer que sur des actes et des choix qui doivent être guidés par la recherche du bien commun.

 

Tous ces gens-là espèrent qu’il existe, aujourd’hui encore, un espace possible où l’on puisse s’interroger sur le sens que nous voulons donner à notre condition de citoyens. Mariage pour tous, recherches sur les embryons et manipulation du vivant, euthanasie, sur tous ces sujets et sur bien d’autres encore, chacun doit y voir clair sur les fins poursuivies et les valeurs qui commandent les choix qui sont faits.

 

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Published by voxpop - dans La France en résistance

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