Bonne nouvelle : les Français se rebiffent. Le bras d’honneur de Gérard Longuet, invité à commenter la demande d’Alger d’une «repentance» de la France pour ses « crimes coloniaux » , résume un état d’esprit qui parcourt le pays. Le sénateur UMP ne se savait pas filmé quand, la semaine dernière, il s’est spontanément laissé aller à cette impertinence, en réponse à une énième mise en accusation par le gouvernement algérien qui, pour sa part, s’est toujours exonéré des crimes d’hier contre les pieds-noirs, les harkis, les Kabyles. L’Algérie veut toujours plus de mea culpa, même après avoir entendu François Hollande reconnaître récemment la gravité de la répression de la manifestation parisienne du 17 octobre 1961, en oubliant au passage les exécutions du FLN contre les récalcitrants. Ce bras d’honneur a vite été excusé. Il est dans l’air du temps.
La maréchaussée, qui croyait avoir mis au pas l’atavique esprit frondeur, est débordée par les contrevenants. Partout, ses intimidations font chou blanc. L’accusation en homophobie, censée protéger de la critique le communautarisme homosexuel, vole en éclats à propos du mariage gay exigé au nom d’une égalité tirée par les cheveux. La surprenante pugnacité des religions, et singulièrement des évêques de France, secoue l’opinion au point que le Grand Orient s’est cru obligé, lundi, de rappeler méchamment à l’Église à ne pas « interférer » dans les débats, sans s’interroger lui-même sur sa légitimité. L’islamophobie, pareillement, est désormais comprise pour ce qu’elle est : un moyen destiné à rendre intouchable l’islam politique. La une du Point sur «Cet islam sans gêne» rappelle que des médias sortent enfin de leur autocensure.
Ces réactivités, qui vont susciter dès ces prochains jours d’inédites manifestations de rue contre l’islam radical et le mariage homosexuel, approuvé mercredi en Conseil des ministres, sont autant de bras d’honneur aux missionnaires du discours cloné, revigorés par l’élection de François Hollande et la réélection de Barack Obama. Un vent de résistance se lève contre les interdictions d’énoncer des évidences. Le refus du déclin mobilise les initiatives de la droite, hébétée lorsqu’elle était au pouvoir. Jean-François Copé, candidat à la présidence de l’UMP, ne fait pas mystère de suivre ce courant porteur que François Fillon a tort de juger «clivant» . Ce réveil pousse aussi sous les projecteurs la jeune génération de l’UMP (la Droite forte) représentée par Guillaume Peltier et Geoffroy Didier. De bonnes cartes sont à jouer.
Mais la gauche a aussi l’opportunité de se ressaisir, tandis que les réalités démasquent les faux-monnayeurs et leurs baratins. Quand Louis Gallois, ancien patron de la SNCF et d’EADS, adjure, lundi, le gouvernement d’ «arrêter la glissade» des entreprises non concurrentielles, il invite peu ou prou le chef de l’État à faire, à son tour, un bras d’honneur aux dogmes socialistes et aux ayatollahs Verts : les premiers refusent de penser la compétitivité au prétexte de ne pas «faire de cadeaux aux patrons» ; les seconds vont jusqu’à refuser de mener des recherches sur l’extraction du gaz de schiste, cette possible énergie de substitution. Si le gouvernement a préféré reculer devant les imprécations des écolos, son sursaut en faveur des patrons est l’autre bonne nouvelle de la semaine. Le PS, converti au bon sens ?
Ce que le ministre de l’Économie, Pierre Moscovi, présente comme « une véritable révolution copernicienne pour la gauche » est plus simplement une conversion à un bon sens qui lui était étranger. Ce bon sens estcelui du rapport Gallois quand il note que le coût du travail, qui supporte le poids énorme du financement de la protection sociale, freine la productivité des entreprises et explique le décrochage du commerce extérieur. Certes, Jean-Marc Ayrault n’a pas été, mardi, jusqu’à reprendre la trop évidente et minimaliste suggestion d’alléger immédiatement de 20 milliards d’euros les charges patronales et de 10 milliards les charges salariales. Reste que le crédit d’impôt de 20 milliards d’euros en faveur des entreprises pour 2014, l’engagement à réduire de 10 milliards supplémentaires les dépenses de l’État et le recours à la TVA que s’interdisait le candidat Hollande, sont des petits pas réformistes qui vont dans la bonne direction, même s’ils empruntent des chemins tortueux et s’ils évitent de poser la question du financement futur du modèle social. Mais le gouvernement ne voit-il pas que ces mesures, qui laissent comprendre que l’impôt est un frein au dynamisme économique, contredisent sa boulimie fiscale ? Obama et le déclin américain
La victoire de Barack Obama, mercredi, met cependant un bémol aux remises en question du politiquement correct. Le président américain, réélu par les minorités, est le produit de cette idéologie culpabilisante et racialiste, qui estime que l’Occident aura toujours quelque chose à se faire pardonner et que le temps est venu pour l’homme blanc de laisser la place. «Nous sommes en grande convergence» , s’est empressé de déclarer le président français, soutenu par la claque médiatique. Mais l’absence de triomphalisme ayant accueilli, aux États-Unis, la reconduction d’Obama (qui a perdu huit millions de voix par rapport à 2008) souligne une inquiétude de la société sur sa cohésion et la préservation de sa puissance, écornée par quatre ans de mandat ( voir mon blog). Mitt Romney a échoué à cause d’alliés extrêmes, de son inconstance et de son incapacité à s’adresser, notamment, à la minorité hispanique, de plus en plus importante : en 2004, elle avait apporté 44 % de ses voix à George W. Bush, contre 27 % cette fois-ci à Romney. Les États-Unis, qui n’impressionnent plus sur le plan international, sauront-ils conjurer leur déclin amorcé ? Contestable progrès
Jamais les États-Unis n’ont été aussi fractionnés et affaiblis que sous l’effet du changement de leur population. 93 % des Noirs, 73 % des Asiatiques, 71 % des Hispaniques ont voté Obama, tandis que Romney a recueilli 59 % du vote des Blancs. Est-ce ce type de communautarisme qui est souhaitable pour la France ? Il est encore temps de faire un bras d’honneur à ce multiculturalisme qui cherche à s’imposer au nom d’un contestable progrès.